Evolution de la population agricole

Historique de la population agricole à Cruzille depuis deux siècles

Au 19ème siècle ainsi que dans la première moitié du 20ème avant la guerre de 39/45, la majorité des habitants du village vivait d’une petite agriculture vivrière, c’est à dire celle qui la faisait « vivre », celle qui la nourrissait. Ils avaient quelques arpents de terre qu’on leur prêtait ou attenant à la maison qu’ils louaient, pour beaucoup ils y cultivaient leur potager dans lequel couraient quelques poules. Ils avaient, parfois, pour les moins pauvres, un porc nourri avec les déchets alimentaires, ou avec ce qu’ils glanaient. Certains avaient quelques chèvres qui leur assuraient ainsi un peu de lait et des fromages qui pouvaient être vendus. Un certain nombre travaillait aux travaux agricoles comme journaliers, ou ponctuellement, au moment des moissons, des vendanges. Les propriétaires terriens, plus importants ou plus riches, avaient des ouvriers agricoles, en plus ou moins grand nombre, des bergers parfois et, éventuellement, des métayers, s’ils n’exploitaient pas eux-mêmes leurs terres. En résumé, l’activité du village était alors presque entièrement tournée vers l’agriculture.

L’évolution de la population : Les recensements de population

NB : si certains chiffres apparaissent erronés, c’est du aux difficultés de transcription de certains registres anciens
*De 1949 à 1954 les enfants de l’institut du château ne sont pas recensés, à partir de 1954, ils sont recensés à part , on a donc le calcul de la population municipale (et celui de la population globale).

Les recensements de population sont effectués régulièrement , par l’administration française, depuis 1836 et à peu près tous les 5 ans depuis. Ils permettent de mettre en évidence les périodes importantes de forte population ou au contraire d’exode.

On voit qu’à partir d’un pic de 760 habitants en 1836, il y eut une première baisse importante de la population, à la fin des années mille huit cent quatre-vingt, ce qui correspond à la pleine période du phylloxera affectant le vignoble. Ensuite, progressivement, les vignes malades, arrachées, vont être replantées mais en attendant qu’elles se remettent à produire, il va falloir travailler tout de même, et donc un certain nombre de familles d’ouvriers, mais de propriétaires aussi, vont devoir quitter le village, d’où une population réduite à 396 habitants en 1896.

La deuxième baisse sensible de population est une conséquence de la guerre de 14/18, les hommes, jeunes et moins jeunes, étaient mobilisés. A la fin du conflit (que certains n’ont terminé qu’en 1919 !), quand ceux qui avaient réchappé aux combats sont revenus (17 Cruzillois sont morts au combat), le travail n’a pas été facile pour tous. Beaucoup étaient blessés, handicapés, la vie s’était transformée au hasard de la guerre, et dans certains foyers, il n’y avait même plus d’hommes pour travailler ! À nouveau des familles ont donc du partir vers d’autres horizons (villes, industries ou autre) où le travail serait peut être moins dur à trouver, d’où une population de 286 habitants en 1921.

Ensuite, c’est juste après la guerre de 39/45 en 1946, que la population sera au plus bas avec seulement 216 habitants !

À partir de ce chiffre minima, la population communale remontera très légèrement pour rester ensuite relativement stable, voisine de 250 habitants, jusqu’en 2011 avec 246 habitants (*Attention sur le tableau on distingue bien population communale d’une part, et population globale d’autre part, qui comptabilise les enfants internes de l’Institut du château).

Les statistiques agricoles des archives municipales

Grâce aux statistiques agricoles réalisées depuis longtemps et relativement fréquemment, en particulier à la fin du 19ème siècle , en les recroisant éventuellement avec les données des recensements de population, on peut observer les changements dans la vie agricole.

En 1836, 195 cultivateurs ou cultivatrices sont recensés sans précision, seuls 3 fermiers sont distingués. Par contre il existait 2 charrons, 6 fendeurs de bois, 4 scieurs de long,1 bûcheron, 1 meunier, 4 maréchaux-ferrants, 1 garde forestier, 1 garde champêtre, 2 marchands de vin, 1 marchand de fromage, qui appartenaient aussi au secteur de l’agriculture. Tous ces métiers semblent avoir été le reflet d’une vie agricole intense.
On note aussi , un grand nombre de domestiques dont les tâches n’ étaient pas précisées et qui pouvaient être affectés à l’entretien, la cuisine, le service , mais aussi , bien souvent, aux travaux agricoles ; enfin, les épouses n’étaient pas toujours comptabilisées comme cultivatrices.

En 1906, 387 habitants sont recensés à Cruzille, sur cet ensemble on dénombre, sous des dénominations variées (cultivateur, propriétaire récoltant, vigneron, métayer, berger…) plus de 200 personnes travaillant dans l’agriculture, soit plus d’une personne sur 2 de la population globale (qui comprend aussi, bien sûr, les enfants qui n’ont donc pas encore de métier). Ainsi il apparaît juste d’affirmer que la vie du village était essentiellement tournée vers l’agriculture. Les autres professions  représentées étaient celles d’ instituteur, buraliste, épicier, couturière, blanchisseuse, boulanger, commerçant, aubergiste, marchand ambulant, rentier, tisserand, menuisier, charpentier, forgeron, maçon, domestique, jardinier, tonnelier, charbonnier, cordonnier, géomètre expert, scieur de long, cantonnier, garde champêtre…

Les cultures, les récoltes

En 1889, 103 producteurs avaient leurs récoltes inventoriées : froment, orge, avoine, maïs, pommes de terres, betteraves fourragères, trèfle, luzerne, foin, regains, noix. 31 d’entre eux exploitent 199 coupées (1coupée = 4,5 ares) de vignes qui ont produit 54 hl de vin.
En 1890, on retrouvait les mêmes cultures mais aussi : seigle, méteil, millet, sarrasin, colza, chanvre, sainfoin, fruits, légumes frais, légumes secs, et il est précisé qu’il y avait 130 ha de prairies naturelles.
Un petit tableau des archives communales, comparant 1914 et 1917, montre les baisses de productions agricoles pendant la 1ère guerre mondiale.

Le bétail

Il évolue selon les années mais il reste important jusqu’au milieu du 20ème siècle. En 1872, de nombreux foyers sur tout le village, avaient quelques chèvres (1à 4) et des poules, mais c’est à Fragnes qu’on trouvait le plus grand nombre de bêtes, notamment de bovins.

Pendant la période de guerre 39/45 des inventaires réguliers et permanents du bétail sont organisés.

La vigne, le vin

En 1864, 144 exploitants viticoles étaient cités pour une surface de vignes de 4630 coupées soit près de 210 ha. La crise du phylloxera allait sévir, puis la guerre de 14/18, on ne compterait plus que 69 exploitants toutes productions confondues !

Au début du 20ème, des plantations de nouveaux cépages vont être essayées contre le phylloxéra, notamment le Noah (blanc) et l’othello (rouge) ces essais s’avéreront vains, et, de plus, à partir de 1935, ces cépages seront interdits, car considérés comme toxiques (à l’époque le Noah aurait donné le « vin qui rend fou »).

1926 voit la création de la première Cave Coopérative du Mâconnais à St Gengoux de Scissé.

L’INAO (Institut National des Appellations d’Origine), créé en 1935, et la loi sur les AOC vont permettre une meilleure organisation des plantations en désignant les cépages adaptés à notre région : Chardonnay, Gamay et Pinot noir pour le Mâconnais. Le métier de viticulteur s’organise donc véritablement et, malgré la guerre de 39/45 qui va sévir, la reconstitution du vignoble se poursuit lentement à Cruzille (comme ailleurs). En 1969, il atteint 71 ha !